Le miracle du tabernacle

Le tabernacle de l'église Notre-Dame-de-l'Assomption

Une visite de l’église de Taverny n’est pas complète sans un arrêt dans la chapelle de l’absidiole nord, où se trouve aujourd’hui un imposant tabernacle vert et doré. S’il est aujourd’hui installé de de façon semble-t-il pérenne, ce tabernacle a connu quelques déplacements aventureux dans notre église, a connu une mise à l’écart de plusieurs années et a même failli être transformé en bois de chauffage! Mais revenons au début de cette épopée. Au XVIIème siècle, il est décidé d’installer un nouveau tabernacle pour conserver les hosties consacrées sur le maître-autel. Le projet adopté est un petit monument de style Louis XIII, à la mode à l’époque, qui se caractérise notamment par un aspect massif et des colonnettes torses.

Ce choix malheureux eut de lourdes conséquences pour le beau retable Renaissance dont s’enorgueillissait l’église! En effet, comme le voulait la liturgie, le tabernacle devait être placé dans le chœur, déjà occupé en partie par l’imposant retable. Mais hélas, le tabernacle une fois en place s’avançait trop sur l’autel qui le soutenait! Il fut alors décidé de supprimer les deux colonnettes du milieu du retable supportant la corniche de l’entablement qui gênait l’installation du tabernacle, et de racler les peintures à fresque décorant le centre du retable. On put alors installer le tabernacle devant le retable amputé… L’aspect final n’est cependant pas en harmonie avec le style gothique de l’édifice, ni avec le retable datant de l’époque Renaissance. Le tabernacle lui-même faillit être détruit pendant la période révolutionnaire de l'an II: il fut mis à l’abri in-extremis par les grands-parents de Théophile Migault (maire de Taverny de 1870 à 1896), qui le firent réinstaller dans l’église vers 1795.

Faute d’entretien, le tabernacle s’altère au fil des décennies sans que personne ne s’en inquiète. Le coup de grâce est porté en 1898 lorsque l’abbé Henri Thomas et Lucien Magne, architecte des Monuments Historiques, décident de restaurer le retable pour lui rendre son aspect d’origine, ce qui implique de déplacer le tabernacle.
Le tabernacle, en fort mauvais état, se trouve alors relégué dans l’abside de l’église, derrière le retable, cachés aux regards des visiteurs, où il continue de se détériorer. Le 25 novembre 1997, cependant, il est classé au titre «objet». En 1998, on décide de redonner à ce mobilier une place d’honneur dans l’église, dans la chapelle de l’absidiole Nord, à la place de l’autel de la Vierge. Mais avant toute chose, l’état du tabernacle nécessite une restauration complète ! Celle-ci est confiée à Monsieur Paul Poilpré, artisan d’art, qui, à partir des pièces détachées retrouvées éparses derrière le retable, parvient à le reconstituer, en recréant les pièces manquantes.

Ce grand tabernacle date donc de la fin du XVIIème siècle (1680 – 1700), mais il a été modifié au XIXème siècle, par l’ajout d’un gradin supplémentaire décoré d’une frise de feuilles de vigne et d’une polychromie verte typique du début du XIXème siècle. Des colonnettes torses sculptées de feuilles d’acanthe encadrent de part et d’autre le mobilier, certaines étant surmontées de petites sculptures simulant des flammes et appelées «pots à feux». De chaque côté, des panneaux plats portent le monogramme de la Vierge Marie. Ils sont surmontés de «putti», des angelots à la tête poupine et aux cheveux ondulés. L’ensemble repose sur un entablement formant gradins, sculpté de feuilles de vigne et de grappes de raisins et peint en son centre d’un motif de ciboire. Ces gradins étaient destinés à supporter de grands chandeliers, que l’on peut encore voir sur les photos de 1905.

Le tabernacle après sa restauration, a été posé sur un simple coffrage de bois décoré d’un antependium ancien, au centre de la chapelle de l’absidiole Nord. Il s’y trouve toujours aujourd’hui !